Triumph Street Triple 675
mod. 2014
Hi there. I'm an english motorbike and I'm here to fucking rock your socks.
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C'était un samedi, j'avais un peu de temps à tuer avant de passer chez un ami. Ma grosse Honda roupille dans un sommeil ou elle se prend pour la RCV championne du monde de SBK.
Jusque-là, rien d'anormal : un banal samedi après-midi un peu morne.
Pour taquiner ma moto je lui tiens ce discours, l'oeil malicieux :
« Tu sais ma grosse, depuis que je t'ai fait chuter comme un crétin dans un rond-point mazouté, je n'ai plus essayé d'autre moto que toi. »Ce à quoi, piquée à vif, elle me rétorque :
« Encore heureux que tu n'aies pas essayé d'autre moto que moi ! Vu le temps qu'il t'a fallu pour me rafistoler, 'manquerait plus que ça ! Déjà que... »« Déjà que quoi ? Termine ta phrase, je n'aime pas quand tu me fais les gros yeux... » dis-je avec une pointe d'agacement dans la voix.
« Non mais rien, laisse tomber, je sais bien que je me fais vieille. T'es comme tous les mecs de toute façon, passé plus de 10 ans, nous autres motos ne sommes plus assez bien à vos yeux. Je t'ai déjà vu te retourner sur une MV Brutale, ne le nie pas ! Ces italiennes, c'est toutes des allumeuses. »« Tu racontes n'importe quoi. Tu sais très bien que tu es la seule qui compte pour moi, ma poupounette d'amour. » fis-je avec un ton dégoulinant.
« Je sais très bien que j'ai pris du cul récemment. » me sort-t-elle, en colère. «J'ai grossi, pas vrai ? Allez avoue que tu fantasmes sur des petites jeunettes, toutes fraîches avec leur cadre aluminium moulé sous pression, et leurs pièces taillées dans la masse. »« Tayédanlaquoi ? Ca n'a rien a voir...même si tu as effectivement pris un peu de poids récemment je t'aime toujours aut... »« JE LE SAVAIS ! Je suis plus assez bien pour toi ! Hors de ma vue, faquin ! » me hurla-t-elle en m'éjectant du siège conducteur.
Don't you think I've got a cute butt ?
Pour me changer les idées, je décide d'aller m'en jeter un dans le rade le plus proche.
Après cinq pintes de bières (et douze shots de vodka, juste pour être sûr) j'avais le moral en berne. Ma grosse VFR avait-elle raison ? Il faut avouer que les dernières machines de la production sont sacrément sexy. Belles formes, lignes élancées, caractérielles...peut-on encore se contenter d'une machine ayant une vocation de routière-sportive vieille de 13 piges et techniquement à la rue ?
Alors que je noyais mes pensées dans mon treizième shot de vodka bas de gamme, (j'en reprendrai un quatorzième, le motard de base est superstitieux) ELLE m'est apparue. D'un blanc pur, réhaussé de froufrous et de broderies bleues. Superbe.
Fine, quasi anorexique, avec des yeux de biche qui n'ont cessé de m'hypnotiser. A son accent, j'ai deviné qu'elle était anglaise.
« Hello, vous êtes seul à ce table, my dear ? » me dit-elle avec son accent suave.
« Gné ? » rotai-je.
« Je demandais si vous être d'accord pour balade amicale, je ne pas connaître le France et je voudrais découvrir le Français. »Ah ben ma grande, avec trois litres d'alcool dans le sang, tu vas voir ce qu'il va te mettre le Frenchie !
Je titube jusqu'à la superbe Triumph qui m'acueille avec ses courbes tendues, alors qu'elle minaude déjà en donnant de la voix, comme un ronron rauque pour me stimuler.
« Tu veux voir le France ? J'vais t'faire voir le France moua, la rosbif ! Accroche-toi à ta culotte, et gode save ze couine ! » ai-je hurlé dans un yaourt approximatif.
C'mon, dear. Rev' me like one of your French girls !
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Ainsi a (à peu près) débuté l'essai de la Trompf.
Déjà, premier constat, qui semble être une évidence : cette machine est fine. Très fine !
Ca m'a presque surpris car, même mon Hornet me semblait plus volumineux. Il est très facile de serrer la Street entre ses jambes, d'autant plus que la hauteur de selle est ridicule. Malgré ma taille moyenne, je posais les pieds par terre les doigts dans le nez. Enfin, les pieds dans le nez. Vous avez compris, quoi.
La position de conduite est neutre, sans surprise. Petit étonnement de ma part avec l'impression d'être directement installé au dessus de la roue avant. C'est bien évidemment dû au contrecoup de descendre d'une moto carénée et assez volumineuse. Je me suis senti très vite à l'aise sur la Triumph, et en moins de 5 minutes je ne craignais même plus de caler.
Les commodos sont pas géniaux : assez petits et peu ergonomiques. Les rétroviseurs sont totalement mal branlés et inutiles. L'un d'eux bougeait même sous la pression du vent. Pour le reste euuuh...
- La protection ? Nafoute, y'en a pas.
- Le shift-light ? Nafoute, j'y ai pas touché, ça clignotait genre à 6,000 tr/min (mouarf !)
- L'indicateur de rapport engagé ? Nafoute, tant qu'il y a des rapports à monter ou à tomber, faut pas avoir fait l'ENA pour le savoir.
- La lisibilité de l'instrumentation ? Nafoute aussi, je regardais la route, ça valait mieux...
Mesmerizing Me voilà donc parti sans aucune saccade,
pour aller choper la bretelle d'accès à la rocade,
afin de trouver le terrain propice à une cavalcade,
pour singer Jackie Chan et faire moi-même mes cascades.
(ce couplet de rimes foireuses est gratuit. N'a pas le talent d'IAM qui veut.)
L'injection est géniale. Souple, d'un dosage terriblement aisé, on fait vraiment faire ce qu'on veut à la moto. S'il n'y avait pas un angle de braquage risible, je me serais bien laissé tenter par quelques évolutions à basse vitesse. Fort malheureusement, je suis une énorme purge dans ces exercices : je me suis donc rabattu sur des évolutions à allure soutenue.
Une fois sur les routes un peu plus dégagées (comprenez les routes où vous pouvez hurler « Dégagez !! » aux caisseux) j'ai ouvert le manuel de la Street de façon scientifique et posée.
En gros, j'ai torché la poignée de gaz comme un lobotomisé.
Quel plaisir ! Quelle moto. Sans aucun doute une des plus amusantes que j'ai essayé. L'étagement du moteur est exemplaire, la boite sans soucis, et le châssis sain et informatif. Impressionnant cocktail ! En dynamique, je n'ai rien trouvé à redire sur la moto.
Le guidage se fait aisément, et la légèreté de la moto concourt à un placement sur l'angle, ainsi qu'à des corrections de trajectoires vives et précises. La moto était chaussée en Pirelli Supercorsa, donc il m'était impossible avec mon faible niveau de pilotage de la mettre en défaut. (c'est objectif, je ne suis pas en train de me déprécier)
Une simple pression sur le guidon en contrebraquage permet de mettre l'anglaise où on le souhaite, et contrairement à ma Honda, beaucoup plus pataude, il est parfaitement possible de resserrer très fort une trajectoire lorsqu'on le souhaite. La maniabilité est superbe.
L'équilibre de la moto est très bon. C'est stable, ça ne plonge presque pas au freinage, et les suspensions de bonne qualité (bien que j'aie essayé la version « de base ») absorbent beaucoup d'irrégularités. Une fois encore, on sent que la grande vivacité de la bécane aide vraiment à bien lire la route. J'ai trouvé que la Street était très supérieure au Hornet sur ce point, et pourtant le Hornet possède une partie-cycle vraiment très bonne. A l'attaque, la Street se permet tout de même de sembler plus affutée que le peu de roadsters que j'ai essayé. Tout vire d'un bloc, ça ne se désunit pas, et la roue arrière n'est jamais dépassée par la puissance. On peut souder sans se poser de questions lorsqu'on fait du roulant. Dans les petits coins et haut dans les tours il faut être un peu plus sur la réserve car le moteur britannique envoie du steak de cheval Spanghero.
No way I'm stopping now ! I'll drive you all the way to hell !
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De 0 à 6,000 tr/min, c'est souple, coupleux et dosable. Etonnant d'une moto dite de faible cylindrée. Pour l'anecdote il faudrait voir à recadrer cette notion de « petite » cylindrée propre aux journaleux : un 600 pour moi c'est déjà un sacré morceau. Mais passons.
De 7,000 à 10,000 la moto pousse beaucoup plus fort et appelle le dernier palier, situé de 11,000 à 14,000 tr/min, zone ou la puissance est la plus importante.
En descendant du VFR je n'ai pas été terrifié par la patate de la Street, car je trouvais que le V4 Honda avait beaucoup plus de force lors de la montée dans les tours. Ceci dit, la Street remporte la palme de la hargne ! Ce moteur est à la hauteur de sa réputation.
En bas, c'est sage et coupleux.
Au milieu ça tracte et ça pousse.
En haut, c'est rageux et puissant.
Bravo aux motoristes, car pour parvenir à accoucher d'un moulbif à trois visages aussi marqués sans que l'injection ne vienne mettre le boxon, c'est du grand art. La poignée de gaz répond à absolument toutes les sollicitations, et avec douceur. Quelle que soit votre allure, quel que soit le régime, la 675 est docile et prévenante. Tout le temps. C'est très plaisant lorsqu'on souhaite rouler cool, et ça l'est tout autant lorsque l'on veut arsouiller un poil. Cette espèce de saloperie est légère, fine, agile et puissante. Entre les mains d'un bon conducteur, ça doit être une horreur à suivre, quelque soit le terrain de jeu. Il n'y a que dans les très grandes ouvertures où j'imagine la Street se faire mettre minable, mais je réfléchis ici à des vitesses qui dépassent allègrement le 140km/h, donc franchement stupide et peu amusant.
Le freinage, parlons-en rapidement. Maîtres-cylindre Nissin, étriers double-piston Brembo. Pas besoin de plus. A l'avant, ça freine fort, ça freine droit, ça freine stable. Super. Le frein arrière est nul : la pédale (de marque « Raphalle », coïncidence ? Je ne pense pas. :p) est bien trop dure à actionner. Pas vraiment une surprise.
Pour les aspects pratiques je vous avoue que j'ai passé l'heure d'essai à faire le débile congénital sur départementale avec la moto, je ne m'y suis donc pas vraiment intéressé. Le bruit de turbine du trois-cylindres en ligne m'a bien marqué, et la sonorité de base de la moto est fort plaisante ! Une véritable réussite qui n'est entachée que par une esthétique qui se « japanise » un poil. Dommage, mais cela n'est que mon avis. J'aimais beaucoup les lignes plus fluides des anciennes versions. Malgré cela, force est de constater que la finition est propre et nettre. Cette machine, considérée comme un « petit » roadster, est très valorisante. Seul son gabarit peut rebuter les plus grands d'entre vous.
Et pourtant, quel pied. Moteur, châssis, freinage, plaisir de conduite à toutes les vitesses. Tout est là.
Absolument tout. La Street Triple est une moto qui se livre avec peu de temps d'adaptation et qui se plie à énormément de contraintes pour n'en exsuder que du plaisir pur. Une simplicité d'emploi qui m'a, paradoxalement, laissé sur ma faim.
Après avoir terminé mon essai, j'étais très satisfait de mon expérience. Je me suis amusé, j'ai pris beaucoup de bonnes vibrations et, de plus, je me sentais enfin moins idiot maintenant que j'avais testé ce fameux bloc triple-cylindre.
Avec le peu de recul que j'ai, j'avoue que je trouve que cette moto est quasi-parfaite. Plus simple à gérer qu'une sportive, plus vive qu'un gros 1000, plus vive et rageuse que nombre de ses consoeurs de même gabarit. Là où le bât blesse, c'est que j'apprécie apprendre à découvrir la moto progressivement. Et la Triumph Street Triple est une machine qui rend tout tellement facile que l'on vient à se demander si on a encore son mot à dire dans le pilotage !
Ne me méprenez pas, je ne suis pas en train de cracher dessus, au contraire. Ayant eu un Hornet, qui est une moto très facile aussi, je ne saurais que louer les mérites de ce type de machines dont le mode d'emploi ne requiert pas de savoir-faire phénoménal. Comme je me plais à le dire, la sobriété est preuve d'élégance et d'efficacité.
La Street est, subjectivement, une moto si facile qu'elle gomme beaucoup de paramètres et sait tout bien faire. En remontant sur ma grosse Honda j'étais un peu à la rue : lourde, grosse, demi-bracelets...et pourtant cette sensation de devoir conduire en osmose avec sa machine et de gérer sa conduite font partie du plaisir moto pour moi.
A force de survoler les difficultés, la Street a, paradoxalement, marqué le seul point d'ombre au tableau de ce fantastique test. Je crois que c'est une fille trop facile, cette foutue rosbif !
Until next time !
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Now, come closer and listen to my voice. Can you feel my engine roar ? I'm waiting for you to "ride" me !