Bonsoir,
Tout le monde le sait, j'ai cartonné. Sévère même. J'ouvre ce topic à part pour raconter ici cette expérience.
Le mardi 5 août 2014, je pars de Beauvais pour rentrer chez moi, une route que je prends tout les jours voir plusieurs fois par jour seulement 10 km à faire. Je monte sur ma K1200RS, ferme le cuir jusqu'en haut, mets les gants d'été semi tissu semi cuir, ferme les manchettes mais je n'ai pas de jean kevlar ni de botte par cette chaleur pour si peu de kilomètre je me suis permis de jouer mon kéké comme souvent quand je ne vais qu'à Beauvais.
Bref, j'enquille tranquillement sur la route, double une Renault familial
(doublage qui se fini sur une ligne continue mais bon j'voulais pas trop tourner la poignée) qui se traîne un peu avant la série de courbe histoire de ne pas être cassé dans le rythme.
La première courbe se passe tranquille, la seconde moins bien, je me décale vers l'extérieur sans trop comprendre pourquoi une sensation de flottement bizarre je décélère pour avoisiner les 90 et prendre la 3ème courbe.
La mise sur l'angle devait être progressive, ce ne fut pas le cas, dès l'entame du virage je perds l'adhérence à l'avant et me retrouve à frotter sur le cale pied gauche et ma chaussure aussi. Je sais que je me fous au tas, et mon regard quitte la route pour savoir où je vais me viander. En voyant que la moto me dirigeait droit vers un gros tronc d'arbre et me rappelant diverses discussions je lâche la moto et faufile ma jambe à l'extérieur grâce au généreux carénage de la teutonne.
Je sens que mon cuir remonte quand il frotte le bitume et mon ventre se fait raboter sévèrement, ça chauffe aussi à l'avant bras gauche, à la hanche et au mollet. Mon jean s'arrache déjà. Mon casque frotte légèrement aussi, je n'ai pas mal mais le bruit de la moto qui frotte plus le résonnement du casque sont loin d'être rassurant.
J'ai les yeux ouvert, je sais que je me dirige dans le bois juste en face, c'est long et rapide à la fois, j'ai le temps de tout voir, tout enregistrer et de souffrir. Je quitte le bitume et prend un peu de hauteur.
A partir de ce moment là, c'est beaucoup plus confus dans ma tête car j'ai eu le plaisir de faire beaucoup, beaucoup de tonneaux. Un coup je voyais le bois, un coup c'était noir, etc. C'est extrêmement stressant de ne pas savoir où on va passer et dans quoi on va taper, surtout que je ne peux rien faire pour éviter quoi que ce soit mon corps est un vrai pantin. Quand je retombe sur le sol, j'avais mis mon avant bras droit en avant pour amortir. Je le sens se briser net, dans ma tête tout se passe au ralenti je ressens encore mon cœur taper comme un sourd dans ma cage thoracique mais lentement, mais ma course folle continue et je vois que je vais me prendre un arbre. Trois tonneaux plus tard, je m'explose le pied droit dans un bruit sourd et une douleur à la limite de perdre conscience. Mes deux jambes partent en arrière, j'ai mes genoux qui hurlent de douleur, j'ai le souffle coupé, je n'en peux plus de cette lenteur de chute je veux que ça s'arrête rapidement.
Pour moi je roule en m'explosant chacun de mes membres depuis au moins 1 minute, j'ai le temps de penser à plein de chose dans ma vie, de penser quand ça va se terminer cet enfer, est-ce que je vais y survivre ? C'est cliché etc mais j'ai vraiment eu le temps de voir l'essentiel de ma vie et ceux à qui je tiens énormément ou son déjà parti. On ne maîtrise pas totalement son cerveau et dans ces moments là encore moins et il a le don de faire durer la chose cet enfoiré et aime bien me le rappeler la nuit que j'ai mangé un arbre et arraché X branches.
J'ai fini ma course folle en tombant sur le dos lourdement, étalé là dans ce bois, je voyais pas le ciel juste les branches et feuilles des arbres. Je me suis demandé honnêtement si j'étais mort jusqu'à ce que je bouge d'un coup par angoisse de ne pas pouvoir respirer, une sensation d'étouffement qui me pousse à jeter ce qui me reste de gants pour ensuite retirer mon casque et le jeter par terre.
Cette première bouffé d'oxygène me fait sentir vivant, mais surtout me fait hurler de douleur dans la millième de seconde qui suit. J'ai mal partout à m'en faire exploser le cerveau et perdre conscience. Je vois mes jambes, le jean est en lambeau, la jambe gauche est pleine de sang ça me fait stresser un peu mais ma jambe droite ne répond pas la douleur est extrêmement violente mais je n'ai aucune motricité. En essayant de la toucher de la main droite, j'hurle à nouveau de douleur, j'avais oublié que je m'étais explosé l'avant bras. J'utilise ma main gauche et me rend compte que c'est très douloureux sous le cuir, sûrement bien brûlé, et surtout je vois l'état de mon petit doigt qui tire bien la tronche, l'ongle et la chair sont aux abonnés absent côté extérieur de la main. Je sens quand même que ma main touche ma jambe droite. ça rassure un peu malgré la violence de l'accident.
à partir de ce moment là, je cherche mon téléphone, j'ai beau tâter mes poches, il n'est pas là, je l'ai perdu dans ma chute. Je ne peux pas bouger je me dis que je vais finir par crever là jusqu'à ce que débarque un gendarme en hurlant "Monsieur vous allez bien ? Vous êtes conscient ? Monsieur répondez-moi".
Ils sont deux gendarmes, vu la rapidité de leur arrivé, je me demande si je n'ai pas perdu conscience et ose demander textuellement :
- "Comment ça se fait que vous soyez déjà là ?"
- "On passait par là on a vu la moto rouge explosé contre l'arbre, on s'est arrêté pour vérifier"
- "En gros j'ai un coup de cul."
- "Très important monsieur, gardez les yeux ouvert parlez moi, moi c'est Jérôme et vous ?"
- "Clément 22 ans j'habite au ..........."
comme un robotTout le long de la conversation avec lui j'ai parlé avec difficulté je me sentais très mal à la limite de perdre conscience il avait beau me tenir la tête et me regarder droit dans les yeux je n'arrivais pas à bien le voir jusqu'à ce qu'un homme apparaisse devant moi, et se présente comme étant pompier. Fait amusant il habite dans le même village que moi si j'ai bien compris, il avait ce truc qui fait qu'on le regarde. On a discuté ensemble jusqu'à ce que les pompiers arrivent. Il m'a bien aidé cet homme.
Les pompiers pensaient que j'étais mort ou au moins inconscient, ils furent étonnés et en même temps rassuré du contraire. Je retrouve deux anciens potes de collège, j'aurai préféré les revoir dans d'autres circonstances mais bon c'est la vie. J'ai eu le droit à un nombre incalculable de test, prise de tension, rythme cardiaque etc et pendant tout ce temps je soufrai à mort mais ils font leur taff et son obligé de faire autant de bilan avant de me transporter entre le moment où ils sont arrivés et le moment où ils m'ont laissés aux urgences ils a bien du se passer 45 minutes. C'est très long quand on souffre autant mais au moins ils ont prit toutes les précautions nécessaires et le trajet ne fut pas aussi douloureux que lorsque je me suis explosé la clavicule. Ils ont découpés mon cuir, mon jean, ma chemise pour me sortir de là. Je me suis fait engueulé pour avoir retirer mon casque seul et mes gants. Ils ont salués l'efficacité de mon équipement mais mon reproché le non port des bottes et je m'en veux aussi pour ça...
Je suis tombé sur une super équipe qui s'est aussi fait un plaisir de virer les gendarmes qui voulaient me faire souffler. Je leur avait demandé de prévenir mon père et ma copine, et de retrouver mon portable en leur donnant mon numéro. Ils ne l'ont pas retrouvés à temps avant que je parte en camion, mais un peu plus tard avec mon père qui a été prévenu.
D'ailleurs, mon père je n'aurai pas aimé être à sa place, quand il a apprit il s'est empressé de venir, il a vu l'état de la moto avant de me voir, je pense que ça fait un gros coup et il a du penser le pire...
Aux urgences, je suis toujours en état de choc, le cœur qui tape à fond (120), on s'occupe de moi relativement rapidement, ils se mettent à 4 sur moi. J'entend un pompier faire son bilan au toubib et je me souviendrai sûrement toujours du ton grave "sensibilité de la jambe et du pied droit ok mais zéro motricité". On me met un plâtre temporaire à cette jambe. On me soigne mes brûlures, par endroit on me retire les lambeaux de jean, ça fait un mal de chien mais je serre les dents.
J'ai fait ensuite je ne sais pas combien de radio de tout le corps et 3 scans donc un contrasté. Une fois ça fait on me met en attente brancard et quelque minutes plus tard Lady-V apparrait devant moi avec mes parents...
C'est un très grand soulagement de la voir et provoque une monté de sentiment, larmes etc indescriptible. Elle est prévenue, me voit et sait que je ne vais pas trop trop mal encore. ça fait du bien après autant d'épreuves de voir sa chère et tendre.
Voilà comment j'ai vécu mon accident le premier jour. La douleur que j'ai ressenti était toujours à la limite de me faire perdre conscience, tout ce que j'ai pu penser etc dans ma tête est angoissant. Je trouve qu'il y a une différence entre un petit accident où on se casse qqch et celui que j'ai fait. J'ai l'impression de revenir de loin et gendarmes, pompiers, médecins, proches me disent la même chose. Ce n'est pas une expérience à vivre et je le souhaite à personne. Je ne vois pas ma vie sans moto, mais j'avoue que je réfléchis quand même au fait d'arrêter je m'en sors très bien, j'aurai pu être paralyser ou tout simplement mort mais non je n'ai que des fractures et brûlures. J'ai eu beaucoup de chance sur ce coup là.
Le lendemain matin, j'ai passé un scan du pied droit et je montais au bloc à 1H de l'après midi pour me faire opérer pendant 5 heures (4 heures pour le pieds et 1 heure pour l'avant bras). Je vous posterai les photos des radios. Je vais m'arrêter là pour mon récit et je vous passerai les moments difficiles après opérations etc. Heureusement que Lady-V est là pour moi ainsi que mes parents. Elle m'a énormément aidé et pris soin de moi et mes parents aussi. Merci beaucoup à nouveau. Je te remercierai jamais assez pour tout ce que tu as fait.
Merci aussi à ceux qui sont venus me voir à l'hosto je ne l'oublierai pas.
En moto, on est fragile, on prend souvent des risques inutiles en arsouillant etc ce genre d'expérience calme même si j'étais loin de rouler vite et si je remonte sur un 2 roues, je roulerai de toute évidence d'une autre manière.
Voilà, je voulais partager ce moment difficile avec vous, certains liront tout, d'autres non. J'espère que ça servira au moins à faire réfléchir quelques personnes et refroidir certaines ardeurs de gros gaz dans des moments inadaptés.
EDIT :
Je joins ici les photos de la moto plus bas, il y a les photos du lieu.