j'ai trouvé
cet article sur le net, et j'ai trouvé bon de le mettre ici
Je vous le cite également au cas où il disparaisse...
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Voxan: l'espoir déçu d'une moto à la française !La France est une terre motarde très paradoxale. Ici sont nées des marques parmi les plus populaires comme les plus luxueuses, et ici sont nées des idées géniales et des solutions techniques révolutionnaires. Et pourtant, jusqu'à aujourd'hui, aucune marque française n'a réussi à s'inscrire à la fois dans le succès et dans la durée. Ce que les allemands et les américains ont su construire sur le long terme, la façon dont les japonais ont su percer et ce que les anglais ont su faire renaître, jamais les français n'ont réussi à le mettre en place. Ce n'est pourtant pas faute de passion ni d'engagement. La brève première existence de Voxan, la détermination avec laquelle la marque a tenté de perdurer et surtout la qualité des machines sorties des ateliers d'Issoire en sont la preuve. Heureusement, dans la galaxie automotive, la mort n'étant pas toujours définitive, Voxan est aujourd'hui sur le point de refaire surface. D'une certaine manière, l'histoire se répète, puisqu'à l'instar de ses devancières la toute nouvelle Voxan Wattman est l'œuvre du designer Sacha Lakic et elle se veut efficace et particulièrement innovante, pour ne pas dire en avance sur son temps... Mais attention, il faut croiser les doigts, prier, se prosterner devant l'hôtel du Dieu qui-se-penche-dans-les-virages et trancher la tête de quelques poulets en plastique en guise de sacrifice rituel, parce que c'est sur ce point précis, être en avance sur son temps, que la moto française semble victime d'une malédiction. Espérons donc que les monégasques de chez Venturi, déjà forts de leur expérience dans le secteur automobile, parviendront à ressusciter un superbe nom de la moto française, mais aussi la moto française tout court en participant, de manière quelque peu décalée, à la dynamique impulsée par deux jeunes marques hexagonales : Avinton et Midual.
La Wattman, le futur électrique imaginé par Sacha Lakic et Venturi !Wattman, c'est donc le nom de la toute nouvelle Voxan. Comme son nom l'indique – et comme chez Venturi, adieu pétrole, fini le thermique, goude baille pot d'échappement... La moto n'est même pas hybride mais bel et bien full electric, ou 100 % électrique, si vous voulez. Mort au CO2 qu'on vous dit ! Dans une certaine mesure, je trouve l'idée séduisante. Mais je me demande ce que vient faire le nom de Voxan là dedans, en quoi l'imposante Wattman est-elle la digne héritière d'une lignée de magnifiques motos françaises qui mélangeaient – avec brio – haute technologie, performances et tradition ?
Voxan Street ScramblerTechnologie, performances et tradition, trois mots faciles à mettre ensemble dans une phrase, mais plus difficile à faire cohabiter dans une moto. Et pourtant Voxan l'a fait. Flashback, ou éclair en arrière, si vous préférez : Voxan apparait au beau milieu de la France, à Issoire, et au beau milieu des années 90, en 1995 exactement. Jaques Gardette, fondateur de l'entreprise met aussitôt tout le monde au travail, dont Sacha Lakic au dessin, Alain Chevalier – chargé de plancher sur le châssis, tandis que la société Sodemo s'occupe moteur. Tout juste deux ans plus tard, en 1997, le premier modèle, nommé Roadster, est présenté avec une certaine fierté. La Voxan Roadster, produite à 800 exemplaires au total, est esthétiquement très typée seconde moitié des années 90, pas mal de rondeurs et beaucoup de plastique qui brille mais ce ne sont pas tant ses lignes que son architecture qui retiennent l'attention générale. La première Voxan à posé d'emblée une certaine signature techno-dynamique que l'on retrouvera ensuite dans toutes les autres productions de la marque : un bi-cylindre en V à 8 soupapes de 996 cm3 et une suspension arrière mono-amortisseur logée en position centrale, sous le moteur. Tous dotées d'une injection électronique et développant une centaine de chevaux (puissance maximale autorisée en France), les moteurs Voxan faisaient jeu égal avec les meilleurs, Ducati en tête, mais aussi Honda VTR, Yamaha TRX et consorts. Ils étaient même capables de rivaliser avec les fameux quatre cylindres Japonais qui trustaient alors les premières places de la catégorie reine des ventes, nommée Hypersport. Et côté partie cycle (châssis, suspensions, roues et freins), re-belote et dix de der. Les Voxan n'avaient rien à envier à la concurrence, elles se plaçaient même aisément dans le très haut du panier. Preuve en est les multiples victoires de Voxan au Dark Dog Moto Tour (de 2003 à 2014 !), notamment avec Emmanuel Arnoud sur un relativement ancien modèle – Café Racer, et Thierry Sol qui se paye le luxe d'un titre de champion du monde, sur sa VX10, un modèle remontant à 2009 et construit à moins de trente exemplaires ! Avouez qu'il faut avoir confiance en soi, mais aussi en sa machine pour oser mettre la poignée dans le coin dans tous les bouts droits et le genoux par terre à chaque virage, en rallye routier et avec une pièce de collection s'il vous plait... Donc, vous voyez, côté architecture et mécanique, chez Voxan on savait conjuguer efficacité et modernité. Oui mais bon, et la fameuse tradition dont je parle au début du paragraphe ? « Où qu'elle est la tradition » ?
Voxan Café RacerAvec un premier modèle nommé Roadster, un second appelé Café Racer (2000-2009, 1000 exemplaires) et un troisième répondant au nom de Scrambler (2001-2006, 320 exemplaires)... Pas la peine de faire un dessin. Au tournant des années 2000, alors que la fameuse catégorie Hypersport régnait en maîtresse incontestée, Voxan a joué les trend setter, ou faiseurs de mode si vous aimez mieux, en imposant sa gamme néo-rétro sans rougir et sans chercher à copier qui que ce soit. Voxan serait elle à l'origine de la vague vintage qui déferle encore aujourd'hui ? Il y a la un potentiel débat... Quoi qu'il en soit, la plupart des modèles de la marque auvergnate ont su toucher le cœur des motards cultivés au rock et aux sixties, ou aux années soixante si vous n'êtes pas vraiment anglophiles. Ainsi, le Café Racer et le Scrambler sont des ré-interprétations nostalgiques mais modernes d'un style lié à ce que beaucoup considèrent être l'âge d'or de la moto ; deux autres modèles, la Black Magic (2004, 190 exemplaires) et la Charade (2006, 22 exemplaires) sont des hommages encore plus directs. « La Black Magic telle que je l'ai imaginée est un hommage aux cafés racers mythiques des années 60, comme la Norton Manx 1959 ou la Vincent Black Lightning 1960″, explique le designer Sacha Lakic. Quand à la Charade, modèle sportif ultime, son nom lui vient du fameux circuit auvergnat inauguré 1958.
Voxan Charade RacingVoxan, comme avec un œil dans le dos et un autre sur le front, a parfaitement su concilier héritage et regard visionnaire... Juste avant de s'écrouler. Alors que s'est-il passé ? Pourquoi la marque a-t-elle luté pour sa survie pendant plus de la moitié de son existence ? Malgré des motos aussi bien nées, malgré une gamme très cohérente et des évolutions de modèles tout ce qu'il y a de plus logique (par exemple la Scrambler s'améliore et se décline en Street Scrambler à partir de 2003 pour une production de 290 exemplaires), après avoir fait l'unanimité dans la presse comme dans les rues, après avoir été épaulée par le groupe Dassault, après avoir couru les 24 heures du Mans, l'excellent championnat Protwin, le difficile Moto Tour et même le mythique Tourist Trophy de l'île de Man, après avoir été distribuée dans un réseau d'envergure européenne et après avoir été cotée en bourse, Voxan voit portant son déficit augmenter d'année en année et la liquidation judiciaire est prononcée en 2009. Peut être bien qu'il y avait de la magie noire derrière tout ça, finalement. C'est une bien triste fin pour une si belle marque. Voxan n'a pas été l'exception qui confirme la règle : peu importe le génie dont on fait preuve ou le succès d'estime qu'on remporte, vouloir fabriquer des motos en France, à l'échelle industrielle, a à peu près autant de chance de réussir que de vouloir expliquer que la Terre n'est pas au centre de l'univers au début du XVIIè siècle.
Bizarrement, ou heureusement, quand on est un génie et qu'on meure trop tôt, on ne meurt pas. On ne meurt pas parce qu'on devient une légende, un ensemble d'idées fascinantes et grandioses qui se mettent à briller dans les yeux des passionnés à la seule évocation de votre nom. Il faudrait lui demander si je me trompe mais je pense bien que c'est pour ces mêmes raisons que le bouillant homme d'affaire monégasque Gildo Pallanca Pastor s'est offert Venturi Automobiles dans un premier temps, puis Voxan en 2010. Seulement, pour monsieur Pallanca Pastor, il semblerait que l'héritage de noms comme Venturi et Voxan se limite à leur orthographe. Sous sa coupe, plus question de faire du bruit avec de grossières mécaniques fonctionnant à l'essence. Place aux performances, certes, mais dans un silence total.
Quand on est passionné de voitures et de moto, et quand cette passion remonte à l'enfance, il est question de design, de sensations ressenties en voyant évoluer une machine et/ou en se trouvant à son bord, et parmi ces sensations il y a le son du moteur, particulièrement en moto. Hyper important, le son du moteur. Qu'il s'agisse du miaulement rauque et haut perché d'un quatre en ligne japonais, du martèlement propulseur d'un gros mono ou de la poussée toute en rondeur d'un twin, chaque moteur participe pleinement au caractère d'une machine. Une moto c'est 50% d'image de marque, 50% de position de pilotage et 50% de sonorité... Oui, ça fait 150%. Si vous n'êtes pas motard, allez vous faire dépuceler. Essayez une GSXR, puis une Ducati SS, et une Harley, et enfin un bon vieux 500 XT ou une Enfield, et après ça, alors que vous serez en train de rentrer, ivre de plaisir, chez vous au volant de votre voiture, vous aurez une révélation en bonne et due forme et vous comprendrez qu'une moto c'est 150% de sensations. Attention : je décline toute responsabilité si jamais vous devenez acro.
Voxan Blakc MagicAlors vouloir amputer Voxan du son du V-twin... C'est bien ou c'est mal ? De but en blanc, comme ça, je dirais que c'est très, très, trrrèèès mal. Mais en faisant tourner et retourner l'idée dans ma tête, je me dis « et pourquoi pas ? » L'expérience s'est déjà déroulée avec Venturi, la fabuleuse manufacture de voitures de sport française, une fois passée aux mains de Gildo Pallanca Pastor, s'est inscrite dans une toute nouvelle dynamique. La volonté affichée du monsieur étant d'être un pionnier du véhicule électrique et d'en finir pour de bon avec le carburant fossile... Mais pas avec l'Histoire de l'automobile. Après avoir suscité l'intérêt et fait le lien avec le prestigieux nom Venturi en proposant un véhicule sportif – la Fetish, Gildo a inscrit la marque dans une logique de défis directement inspirés d'aventures mythiques telles que la Croisière Jaune et la Croisière noire, avant de s'attaquer à l'Antarctique. Les véhicules électriques Venturi font leurs preuves dans les traces leurs ancêtres thermiques. Ainsi, Venturi, après avoir été pionnier du grand tourisme à la française dans les années 80, devient pionnier de l'automobile de demain à l'aube du second millénaire. Stratégiquement brillant, je trouve.
J'évoque la partie automobile parce qu'il semble que Voxan est en train de suivre exactement le même chemin, avec la Wattman en lieu et place de la Venturi Fetish. Pour faire le lien avec le passé, Gildo Pallanca Pastor a fait appel à Sacha Lakic pour dessiner la future Voxan et, il faut l'avouer, le résultat est là. Le dessin de la Wattman évoque discrètement la ligne de la Voxan première du nom, la Roadster. À l'image de sa devancière, miss Wattman se veut donc doublement respectueuse de son héritage. Un, sur le papier elle semble digne de ses aïeules, tant en terme de design que de performances ; deux, elle opte pour technologie en vogue avec option « tournée vers l'avenir ».
La Wattman devrait être lâchée sur nos routes au printemps 2015. Tiendra-t-elle les promesses annoncées dans la fiche technique ? 200 CV, un couple instantané de 200 Nm, 0 à 160 km/h en moins de 6 secondes, 180 km d'autonomie et moins de 30 minutes de charge pour remplir les batteries à 80%... Ça laisse rêveur, même si je trouve que certains points ne sonnent pas comme une révolution du genre. 180 km d'autonomie, c'est pas encore ça, en 2009 une intéressante moto thermique hollandaise vous permettait de parcourir près de 900 km avec 22,5 litres de gasoil. Pour devenir une vraie alternative, le tout électrique a encore de gros progrès à faire au niveau de l'autonomie et de la capacité de recharger vite et complètement. Enfin, un bon point pour le temps de charge, tout de même en net progrès par rapport à ce qui se fait aujourd'hui. Mais là où je suis le plus sceptique c'est sur les aspects dynamiques. 200 CV, OK, ça cause, mais la moto est annoncée pour 350 kg – 350 kg ?!? Argh ! C'est très lourd pour une moto. Et pour l'avoir vue en vrai au salon de la moto 2013, je confirme qu'elle est plutôt imposante. Y-a-t-il un gyroscope planqué sous les fesses du pilote ? Ou un système anti gravité directement issu de l'USS Entreprise ?.. Et ce n'est pas tout, avec une vitesse maxi annoncée de 170 km/h la Wattman n'est pas vraiment un missile. Même si c'est une vitesse tout a fait respectable et pertinente aux vues des limitations en vigueur, à 35.000 € le morceau, ça fait un engin qui n'est peut être pas très coûteux au kilomètre mais, pour une moto, ça fait quand même un peu cher du kilomètre / heure.
Voxan ScramblerAlors, que faut-il en penser de la renaissance de Voxan ? La recette Venturi sauce monégasque, en admettant qu'elle soit bonne, peut-elle être tout simplement appliquée à la moto ? La théorie est intéressante mais les faits tendent à prouver que les voitures et les motos, c'est comme les torchons et les serviettes. Ça ne se mélange pas. Mais nous entrons dans une nouvelle ère et les logiques d'hier ne s'appliqueront peut être pas demain. Rendez-vous au printemps prochain pour avoir un début de réponse à toutes ces questions sur la moto française et sur l'avenir de la moto tout court. En attendant, si vous êtes un peu old-school, ou vieille école si vous préférez, et si vous avez envie de rouler en Voxan... Eh bien malgré les faibles chiffres de production, on en trouve tout bêtement sur Le bon coin et les prix varient logiquement en fonction du modèle, mais dans presque tous les cas, vous pourrez vous offrir un morceau d'histoire de la moto française pour bien moins cher que n'importe quelle moyenne ou grosse cylindrée japonaise neuve. Comptez entre 3500 et 5000 € pour un Roadster ou un Scrambler / Street Scrambler en bon état, 4000 à 6000 € pour un Café Racer et 8000 à 10.000 € pour une VB1 (Voxan Boxer, construite en partenariat avec Boxer Design – marque dont je vous reparlerai un de ces jours). Enfin, si vous voulez un véritable collector il faudra vous tourner vers une rare Charade et signer un chèque de 20.000 à 25.000 €. Alors si vous y pensiez et que vous hésitiez, n'hésitez plus ! Rouler en Voxan pour moins de 5000 € c'est une belle opportunité de continuer de faire vivre les idées géniales de la moto française, et avec un taux de sensations de 150 % pour chaque kilomètre parcouru, si ça c'est pas joindre l'utile à l'agréable...
Texte Thierry Vincent
http://www.thierryvincent.com