Bon, il est temps que je vous raconte ma légère glissouille (
), vu qu'apparemment personne n'en aura d'images.
C'était donc la première session de la catégorie débutant, commençant à dix heures moins vingt.
9H35: je finis d'enfiler mon cuir, je zippe bien le blouson au pantalon, je gonfle bien les joues de mon casque
c'est bon je suis prêt. Mais je crève déjà de chaud. Je monte en selle et en attendant les asticots, je commence à tourner en rond, histoire d'avoir un minimum d'air.
9H39: un autre membre du groupe (Rafale) est enfin prêt et nous nous dirigeons tranquillement vers l'accès à la piste.
9H40: le mec du Pôle vérifie nos protections avant de nous laisser nous engager sur la piste.
Premier tour: je pars
très cool. Mes pneus sont froids et pas trop sous-gonflés pour éviter de surchauffer quand la piste sera brulante (1.9/2.1) donc je sais qu'il faut que j'y aille mollo. Et puis de toute façon ma dernière vidange date de l'automne dernier donc je ne veux pas taper dans le moteur avant d'avoir fait 3-4 tours. Jeff s'éloigne donc inexorablement de moi.
2e et 3e tours: je suis calé derrière un mec en R1 qui semble dans le même état d'esprit que moi. Il accélère fort dans les lignes droites (du moins, observé de mes 106 maigres chevaux) mais c'est pour faire chauffer ses gommes car ensuite il ne prend presque pas d'angle en courbes.
4e tour: un mec en CB500 ralentit tout un groupe devant nous. Le mec en R1 se faufile. Je sors enfin le genou et fait l'extèr' à tout le groupe dans le grand droit n°3.
A partir de là, je me lance un peu. Je me concentre sur seulement deux choses, celles que je ratais le plus lors de
mes débuts sur piste: la positions de mes bras (pour garder la moto la plus droite possible) et le cônes d'entrée de courbe (pour avoir des trajectoires un peu plus propres et ne pas avoir besoin d'essorer la poignée). Et ça semble marcher!
J'ai beau ne pas avoir l'impression d'y aller trop fort, je passe tout le monde sans trop de difficulté. Du coup je me prends au jeu et décide de même dépasser le mec en R1.
Tours suivants: je fais le fier et mes cale-pieds frottent régulièrement le sol en même temps que mes genoux. Je double tout les membres du groupe mais étant donné que je suis presque le seul à connaître ce circuit, ça me semble dans la logique des choses. Je continue à me concentrer sur l'angle de ma moto et ça semble marcher, vu que je garde de l'adhérence même lorsque je passe sur des bandes de peinture ou sur un vibreur.
Dernier tour: je vois le drapeau à damier et me dis que cette première session s'est bien déroulée. Je vois Ange au fond et la rattrape gentiment dans la ligne droite entre les virages 3 et 4. Puis, je me concentre sur le mec devant elle. Il se traîne dans le n°5 et je le dépasse donc sans trop de problème. Il n'y a plus personne de rattrapable devant moi; je rentre aux stands, peinard.
Le virage n°6 n'est pas trop piégeux, si on est du bon côté du raccord de goudron. Avant même de l'avoir terminé je commence à réfléchir au suivant qui lui, par contre, peut-être carrément dangereux. Sauf que... je suis toujours en sortie du 6 et que je sens que je perds l'arrière. J'essaie de redresser un peu la brêle et de mettre un peu de gaz pour retrouver l'adhérence mais je sens que le moteur s'emballe
pas cool, ça. Maintenant la glisse me semble inéluctable. "M'en fous: chuis déjà au sol donc j'peux pas tomber plus bas!" Mais c'était sans compter le démon du highside.
La moto glisse maintenant sur son côté droit, les 2 roues en avant, et je suis encore plus ou moins en selle. La moto reprend de l'adhérence alors que nous sommes perpendiculaires à notre élan et je suis catapulté devant elle. Je retombe avec fracas et vitesse, me cassant probablement à ce moment là le poignet (ou du moins l'extrémité du radius). Et comme je suis moins lourd et que je glisse moins que ma brêle, elle me rattrape rapidement pour finir sa course sur moi, en plein milieu de la piste. Mon réflexe adrénalien: vite me casser de là parce qu'il y a du monde derrière et que je suis (dans ma tête) en pleine sortie de virage. Je me dégage sans problème de ma brêle de 240Kg (quand je vous disais que c'était l'adrénaline qui me faisait agir), remarque qu'un commissaire de piste signale ma chute et profite du passage du mec que je venais de doubler à droite pour courir me jeter dans les graviers à gauche de la piste. Et là, j'essaie de réfléchir. "J'ai pu soulever la moto et me réfugier sur le bord
au moins je ne suis pas tétra. Je respire correctement
pas de côte fêlée. Ma main gauche me fait mal
peut-être une entorse ou une déchirure. J'ai un tout petit peu mal à la cheville
sûrement une autre entorse." Je profite d'être encore gavé d'adrénaline pour virer mon gant gauche avant de souffrir le martyr. Le médecin arrive en ambulance, teste ma nuque et palpe mes cervicales et me retire ensuite mon casque avant de me rapatrier aux urgences du Pôle. Et je vous épargne le reste, qui n'a que peu d'intérêt.
Pour expliquer ma chute (vu que depuis j'ai eu pas mal d'heures pour y réfléchir), je ne vois que deux explications (complémentaires) possibles: excès de confiance et pneu inadapté. Je pense que j'ai voulu me relever
avant d'avoir redressé la moto et que mon Roadsmart 2 (qui n'est pas prévu pour la piste) s'est liquéfié sous les contraintes que je lui imposais (angle, température de la piste, nombre de tours, etc.). Je parle de liquéfaction alors que les physiciens diraient plutôt "fusion", mais le phénomène me semble pertinent parce que ce RS2 ne s'est pas comporté comme d'habitude, en décrochant progressivement. Là, il est passé d'une phase d'adhérence totale (j'avais même choppé le bon point de corde) à une phase de glisse totale et incontrôlée sans jamais prévenir, même pendant les X virages que j'avais pris plein angle jusque là et dans lesquels il n'avait jamais fait mine de décrocher.
Le bilan médical actuel est: fracture du poignet (ou du radius, je sais jamais) réparée avec 2 broches et fracture sans déplacement du 5e métatarse (os long du pied) soignée par attèle plâtrée. J'ai à priori 3 semaines avant qu'on ne me retire le plâtre au pied et 6 semaines pour le plâtre du poignet. J'ai décidé d'annuler mon voyage à la Réunion (départ prévu dimanche de Paris) pour éviter de déplacer mon métatarse tant qu'il n'est pas un minimum solide. J'ai dû abandonner le 4 jours de plongée à Port-Cros que j'avais prévu avec ma copine fin juillet parce que je n'ai pas le droit de me mouiller le(s) plâtre(s). Mes vacances d'été, que j'occupe habituellement à rattraper toutes les activités sportives que je n'ai pas le temps de faire pendant l'année, vont être passées à lire et à regarder des films. En gros, ça me fait bien chier, mais c'est pas de la déprime alors ça me va (c'est l'jeu).
PS: est-ce que certains des présents auraient des photos de ma brêle à mettre pour compléter le récit?
Edit: correction du nom du pneu